
BILAN
Au-delà de toutes les informations théoriques, pratiques ou même techniques que nous transmettons sur ce site internet, nous avons choisi de vous faire un bilan de notre ressenti, notre expérience.
Ce voyage d’étude, réalisé dans un cadre universitaire, a le mérite d’être original. Il l’est à la fois pour le milieu universitaire et le domaine de l’aménagement du territoire, qui s’intéresse plus souvent à des structures institutionnelles. Il l’est également pour les habitant(e)s d’Errekaleor qui se sont senti(e)s être des « sujets d’étude ». Cette position d’enquêt(rice)eur n’était pas si simple à tenir, en effet les habitant(e)s sont méfiants, en particulier en raison des conflits qui rôdent autour du statut du quartier. Cependant, de notre arrivée jusqu’à notre départ, nous avons vu un vrai changement dans leur attitude. Au bout du compte, les habitant(e)s du quartier ont fini par comprendre que nous étions là par choix, par intérêt pour ce qu’ils expérimentaient et ainsi, par soif d’expérience. La faible durée de notre présence là-bas (sept jours) n’a pas permis aux habitant(e)s de s’ouvrir complètement à nous et de partager leur quotidien dans son entièreté.
Intéressé(e)s par l’autogestion et curieu(ses)x de voir son application, ce voyage nous a permis d’avoir une première expérience, certes, courte, mais très enrichissante. Le fait d’être confronté(e)s à une situation autogestionnaire nous a permis de discerner les difficultés d’application qu’elle comprend. En effet, l’autogestion se construit à mesure de sa mise en pratique, de même que l’autosuffisance est une construction sur le long terme, pour peu qu’elle soit un principe vers lequel tendre : petit à petit, les individus apprennent à vivre ensemble, à ajuster leurs représentations et leur place en société, pour ainsi recréer de nouvelles mises en réseaux, de nouveaux moyens de subsistances, plus locaux, personnels, éthiques : c’est le but réel de l’autogestion, de se réapproprier son mode de vie et de (re)construire des sociétés gérées par les individus eux-mêmes, directement et de manière horizontale.
Même si le détachement aux réseaux conventionnels et l’implication reste variable selon la volonté politique des personnes, il semblerait que la situation urbaine d’Errekaleor permette un choix de degré d’implication et oblige une restriction dans l’indépendance vis à vis des réseaux urbains.
Cette question d’autonomie en contexte urbain est majoritairement responsable de la réussite, pour l’instant, médiocre du quartier quant à l’impossibilité de tendre vers une autosuffisance en ville (en particulier alimentaire).
Ce bilan, que nous formulons aujourd’hui, ainsi que toutes les données que nous vous transmettons, post-expérience sont à prendre avec précaution. Nous nous sommes rendu(e)s à Errekaleor et avons vécu des moments de vie du quartier d’un instant donné. La situation du quartier est en constante évolution et par ce biais, la restitution que nous formulons aujourd’hui ne reflète certainement pas la situation actuelle. C’est un point sur lequel nous voudrions appuyer, dans le sens où ce quartier est une expérimentation qui se construit petit à petit et évolue dans le temps. Les habitants du quartier et notamment les personnes les plus impliquées en son sein nous ont exprimé, quasi unanimement qu’une des raisons d’existence majeures du quartier était de créer une sorte de modèle pour d’autres personnes, voulant mettre en œuvre un projet autogestionnaire. Par modèle ils n’entendent pas un concept normé et rigide mais au contraire une porte d’entrée vers l’autogestion, un modèle que l’on peut adapter aux réalités et aux bases idéologiques de différents espaces et groupes. Le plus important étant, de démontrer qu’il existe des alternatives au mode de vie qui nous est proposé au sein d’une société capitaliste et globalisée, et que l’on peut tenter de se détacher des institutions nationales et supra-nationales pour créer des modes d’habiter adaptés aux spécificités d’un espace et aux besoins des personnes.